Quand la croix Saliou protégeait des viltañsoù

kroas saliou La Croix Saliou 3Il n’y a pas si longtemps, le secteur sur lequel sont établis aujourd’hui l’ancien et le nouvel hôtel de Ville ainsi que la Poste s’appelait Croix-Saliou ou, en breton, Kroaz-Saliou. Bien avant qu’il ne devienne, il y a moins de quarante ans, le centre-ville que nous connaissons, il s’agissait d’une portion d’espace rural caractérisé par un habitat dispersé.

La « croix Saliou » est le nom initialement donné au calvaire qui se dresse à proximité de la place Général-de-La-Bollardière, à l’emplacement qui a toujours été le sien. Ce nom servait aussi à identifier une maison qui se trouvait très exactement à l’emplacement du centre culturel actuel. Dans l’entre-deux guerres, la ferme la plus voisine avait été construite à Cocastel-Névez, là où se situe
aujourd’hui la résidence Picasso. Quelques habitations plus récentes s’étaient par la suite glissées dans le maillage du bocage.

Une eau souveraine

En ce secteur, l’eau était omniprésente. Elle sourdait en de multiples endroits. Parfois, elle était canalisée : par une fontaine construite en 1943 pour servir à des usages domestiques, par une cressonnière à l’occasion convertie en plan d’eau, ou encore par un lavoir et un abreuvoir aménagés au début des années 1950. Elle était ensuite savamment guidée pour irriguer les prairies
qu’elle traversait, à commencer par celle qui se situait à l’emplacement de l’actuel supermarché...

Parfois au contraire, l’eau stagnait et formait des fondrières (toulloù-kirin), redoutées parce que réputées ne pas avoir de fond… Cette eau sournoise suscitait bien des inquiétudes. Il pouvait à l’occasion s’y manifester des feux follets (goulou-noz) dont l’apparition était toujours angoissante.

Certaines croyances rapportaient la présence de viltañsoù ; ces personnages fantastiques connus pour se complaire dans le voisinage des eaux fangeuses. Il valait mieux alors ne pas avoir affaire à eux : au mieux, les viltañsoù faisaient les gens se perdre, au pire, ils les menaient à la noyade !

Pas étonnant finalement que l’on ait érigé, dès le 16ème siècle, la croix Saliou à proximité de tels lieux : elle assurait ainsi une protection dans un lieu notoirement risqué.

À la croisée de chemins

Cet endroit était traversé par la route venant de la Trinité et dont le tracé était celui de l’actuelle piste cyclable « La littorale ». Deux autres routes y convergeaient. L’une menait à Cocastel-Goz ; elle existe toujours sous la forme d’un chemin piétonnier. L’autre, qui était quasiment tombée en désuétude, menait vers Coat-Édern et au-delà, vers Coatuélen : elle a depuis été réhabilitée et a pris l’allure de la rue du 8-mai-1945. En 1967, la route allant de Plouzané à La Trinité a été élargie, donnant le signal du départ à une révolution paysagère qu’un remembrement partiel avait déjà
amorcée.

En 1972 fut en effet prise la décision de faire de ce secteur le centre-ville de Plouzané : il s’agissait alors de « réunifier Plouzané », de réunir en une seule agglomération le bourg de Plouzané et celui de La Trinité qui, dans les années 1960, avait connu un développement spectaculaire avec la multiplication de « lotissements Marine », à Kerallan, au Gonio, à Keramazé. Au terme d’une procédure d’expropriation, parfois douloureuse pour les Plouzanéens concernés, les travaux commencèrent en 1973 avec la construction, « en pleine nature », de l’école de Kroas-Saliou. La mairie a été construite trois ans plus tard, en 1976 (Voir page « De Coscastel à Castel-Nevez »).

 

Nos remerciements les plus chaleureux à M. Jean-François Simon, pour son aide et sa très précieuse collaboration.